Fiche pratique - Faire la preuve d'un droit d'eau d'un moulin

Vous souhaitez faire la preuve du droit d’eau de votre moulin ?

En premier lieu, vous pouvez chercher un règlement d’eau du XIXe siècle en série S.  C’est un acte administratif, valant autorisation et fixant les conditions du fonctionnement du moulin. Les dossiers contiennent des procès-verbaux de récolement, des procès-verbaux de visite, des rapports d'ingénieurs, des registres d'enquête, des plans parcellaires, des profils en long.  Ces documents prouvent l'existence juridique et administrative du moulin : le moulin est dit "fondé en droit". C'est ce que l'on désigne généralement sous le terme "droit d'eau".

Cependant, de nombreux petits moulins n’ont jamais été réglementés, ils ne disposent donc pas de règlement d'eau.  Dans ce cas, il faut faire la preuve de leur existence avant le 4 août 1789 (loi relative à l’abolition des privilèges). Cette existence avant 1789 leur vaudrait d’être « fondé en titre » dans la limite de leur consistance légale. La consistance légale correspond à la quantité d'eau que le moulin (aussi appelé usine), utilise pour le fonctionnement de son mécanisme. Cela s'applique aux moulins situés sur les cours d'eau non domaniaux.

Enfin, pour les moulins situés sur les cours d'eau domaniaux, il faut rechercher leur existence avant 1566 (Edit de Moulins).

Avant toute recherche : Consulter les éléments en votre possession (actes notariés par exemple), et noter les informations concernant les vendeurs, acquéreurs et celles relatives à l'origine de propriété.

Chercher le règlement d'eau (Moulin fondé "en droit") 

Eléments d’informations nécessaires : le nom du moulin et le nom de la rivière sur laquelle il est situé.

Consulter les instruments de recherche des sous-séries et particulièrement les cotes suivantes :

  • 7 S Hydraulique :  La recherche s’effectue par nom de rivière, mais il existe quelques entrées par nom de moulins et de communes. Dans chaque dossier « rivière » se trouvent des sous-dossiers référencés par nom de moulin, contenant des documents techniques et administratifs tels que : plans, règlement d’eau, arrêté, correspondance…
  • 3 S : Prises d'eau le long du canal de Nantes à Brest. Les dossiers sont classés par commune mais ils ne concernent pas seulement des moulins. 
  • 29 S : Usines et barrages par bassins. Les dossiers contiennent des plans, des rapports, des notes et des correspondances.
  • 30 S 7 : Droits d'eau, rivière et étang de Pont-L'Abbé.
  • 43 S 1 : État statistique des irrigations et des usines sur les cours d'eau ; dossiers relatifs aux moulins par bassin, qui contiennent notamment des contentieux.
  • 54 S : Ces dossiers émanent de la Direction départementale des Territoires et de la Mer et concernent le suivi administratif de nombreux moulins situés dans le Finistère :
La recherche en série S a abouti ? Vous avez trouvé le règlement d'eau.
La recherche en série S n’a pas abouti ? Vous allez devoir prouver que votre moulin est "fondé en titre".

Exemple Règlement d'eau sur Saint Evarzec (7 S 42) :

Établir la preuve que votre moulin est "fondé en titre" 

La démarche demande rigueur, méthode et persévérance de la part du chercheur. Les résultats sont incertains, à cause notamment des limites, des possibles lacunes ou du mauvais état des documents. Pour toutes ces raisons, il peut arriver que certaines recherches n’aboutissent pas.

La   sous-série 1 Q « Domaines nationaux » contient les dossiers de nationalisation des biens confisqués au clergé ainsi qu’à la noblesse entre 1789 et l'an II. Les documents ne sont pas antérieurs à 1789 mais puisqu'ils concernent des biens confisqués, appelés aussi "biens nationaux", cela induit que ces biens existaient avant 1789. Cette piste est à exploiter prioritairement.
Pour commencer, consulter le dépouillement du fichier des ventes des biens nationaux.

Pour chaque vente, sont précisés les éléments suivants : nom de l'immeuble, nom de l'ancien acquéreur, date de l'acte, référence au registre des ventes. Ces relevés renvoient vers la sous-série 1 Q mais également vers la série L (Administrations de la période révolutionnaire).

Si la recherche dans le fichier des ventes n'aboutit pas, il faut poursuivre dans l'inventaire général de la sous-série 1 Q car d'autres documents sont susceptibles de contenir des informations : procès-verbaux d'estimation, soumissions, dossiers de contentieux, séquestre des moulins...

Effectuer la recherche par nom des familles propriétaires (si vous le connaissez), par nom de commune, par nom de moulin : consulter l'index en fin d'inventaire et croiser les éléments si nécessaire.

La recherche en sous-série 1 Q a abouti ? Le moulin est mentionné comme bien national, ce qui induit qu’il existait avant 1789
La recherche en sous-série 1 Q n’a pas abouti ? Il faut poursuivre vos recherches dans d'autres fonds (série L,  sous-séries 5 C à 39 C, sous-série 4 E, ...)

 


La   série L  Documents administratifs et judiciaires de la période révolutionnaire, 1790 - An VIII. 

Un document de cette série ne fera pas automatiquement la preuve de l'existence du moulin avant 1789, tout dépendra de sa nature. Par exemple, un "État statistiques des moulins, an II" : il s'agit d'un document administratif de l'an II, recensant les moulins en activité en l'an II. On peut donc supposer que la construction du moulin est antérieure.

La recherche en série L a abouti ? Votre moulin est "fondé en titre"
La recherche en série L n'a pas abouti ? Il faut poursuivre vos recherches dans d'autres fonds.

 


La   carte de Cassini : Établie dans le courant du XVIIIème siècle, elle recense et localise les moulins existants au moment de son élaboration. 

Elle est consultable sous forme numérique sous les cotes 7 Fi 53, 7 Fi 55, 7 Fi 57 à 59.

Les   sous-série 5 C à 39 C : Fonds des bureaux du Contrôle des actes et des droits joints. 

Une mention du moulin dans un de ces documents suffit pour faire la preuve qu'il est fondé en titre.

Un tableau de dépouillement des noms de moulins mentionnés dans les fonds des bureaux de Contrôle a été établi par les Archives. Il est très incomplet car tous les bureaux n'ont pas fait l'objet d'un dépouillement, et ce travail concerne essentiellement les tables des baux établies juste avant 1789. Vous pouvez le consulter, à titre indicatif, dans le tableau ci-dessous.

Si le nom du moulin ne figure pas dans le tableau, consulter les tables du bureau de contrôle, elles sont de plusieurs ordres. Il faut au préalable identifier le bureau de contrôle dont dépendait la paroisse où le moulin est situé. Ces tables indiquent généralement le nom du notaire ayant rédigé l'acte, et permettent ainsi de poursuivre les recherches dans les fonds des études de notaires :

  • Tables des baux à ferme : un seigneur "louait" le moulin à un fermier ou un métayer, un bail était établi pour une durée variant entre 3, 6 ou 9 ans. 
  • Table des acquéreurs et nouveaux possesseurs
  • Table des vendeurs et anciens possesseurs
  • Sommier des biens des gens de mainmorte (concerne les biens du clergé )

Leur lecture n'est pas toujours aisée mais le nom du moulin est mentionné dans la colonne "nature de l'enregistrement" ou "localisation du bien" (voir la fiche d'aide à la recherche "Contrôle des actes").

La recherche a abouti ? Vous avez fait la preuve que votre moulin est fondé en titre. 
Vous pouvez cependant compléter vos recherches en consultant les fonds notariés.
La recherche n'a pas abouti ? Consultez les autres fonds anciens susceptibles de contenir des informations.

Poursuivre votre recherche dans d'autres fonds

Vous pouvez poursuivre vos recherches dans les séries et sous-séries indiquées ci-après. Cependant, celles-ci s'annoncent plus difficiles et aléatoires. La lecture des documents anciens n'est pas toujours aisée, et à part pour quelques fonds classés à la pièce, et indexés au dossier, la recherche s'apparente à des fouilles minutieuses.

  Sous-série 4 E : Les minutiers des notaires contiennent de nombreux documents utiles à la recherche foncière : actes de vente, baux, obligations, inventaire après décès, renable. Le renable d'un moulin par exemple, est une pièce extrêmement intéressante : il décrit les biens mobiliers et immobiliers du meunier, en distinguant les biens propres du meunier, des biens faisant partie du moulin. Il mentionne également les travaux effectués ou à prévoir pour l'entretien du moulin : machinerie, bief...

Les actes de vente mentionnent souvent les origines de propriétés sur une ou deux générations. Il suffit alors de bien relever les indications et de retrouver l'acte antérieur, et ainsi de suite, jusqu'à remonter à la période antérieure à 1789.

Cependant, avant de vous plonger dans les fonds notariés, il faut identifier l'étude susceptible d'avoir rédigé l'acte. Si vous ne possédez pas cette information, une recherche dans les fonds du bureaux du Contrôle des actes est nécessaire (voir ci-dessus).


  Série J : Du chartrier seigneurial aux fonds d'entreprise, de la pièce isolée au fonds conséquent, la série J comprend les documents "entrés aux Archives par voie extraordinaire", c'est-à-dire ceux qui ne proviennent pas des administrations et officiers publics contraints réglementairement à verser leurs archives. Les chartriers, et les "dossiers clients" des notaires présentent des opportunités pour votre recherche. A noter par exemple le chartrier du château de KEROUZERE (fonds 151 J), lequel regroupe les papiers de la seigneurie de KEROUZERE (Seigneurie s'étendant sur le Nord du département, du côté de Sibiril, Plouenan...)

La quasi-totalité des inventaires de la série J est publiée et accessibles en ligne sur notre site internet. Accéder aux inventaires publiés de la série J.


  Série B : Elle concerne la justice sous l'Ancien Régime et regroupe les actes des juridictions anciennes : cours royales, cours seigneuriales, fonds des amirautés...La part prise par la justice civile est la plus importante, notamment en matière familiale : tutelle-curatelle, biens et successions qui donnent lieu à la rédaction d'actes (émancipation, inventaire après décès, ...).

Les fonds du présidial de Quimper, des cours royales de Conq, Fouesnant, Rosporden ainsi que ceux de la cour royale de Saint Renan, ont donné lieu à la rédaction d'inventaires analytiques complétés d'index alphabétiques. La recherche est donc facilitée. Les fonds des cours seigneuriales n'ont pas fait l'objet d'un dépouillement mais on y trouve un certain nombre de pièces relatives aux grains, aux pesées, des inventaires, des baux...

Les inventaires de la série B sont accessibles en ligne. Les fonds sont conservés à l'annexe des Archives départementales à Brest.


  Série G et Série H : Ces deux séries concernent les fonds détenus par l'Eglise avant la Révolution. Gros propriétaires fonciers, les institutions ecclésiastiques ont, par conséquent, réuni d'importants fonds d'archives relatifs à la gestion de leurs biens. Ces documents peuvent être antérieurs à 1500, cependant la majorité des fonds couvrent les XVIIème, XVIIIème et XIXème siècles. Les inventaires de ces séries sont accessibles en ligne, et ils disposent d'un index alphabétique.


  Sous-série 1 E : Elle contient les titres et papiers des familles nobles, confisqués lors des événements révolutionnaires. Un index alphabétique sommaire des familles concernées est disponible sous forme dactylographiée dans les salles de lecture. Toutefois, les fonds eux-mêmes ne sont pas classés. Ils contiennent les documents ayant trait à la gestion des biens mobiliers et immobiliers des familles, aux mariages, successions, et relations entre les différentes branches des familles, des dossiers de procédures, aveux et prééminences. 

Les fonds sont consultables à l'annexe des Archives départementales à Brest. Le préalable : identifier la famille propriétaire sous l'Ancien Régime.


Ces différentes pistes sont à explorer successivement ou à croiser, en fonction des éléments en votre possession. Si vous ne connaissez aucun élément susceptible de vous aiguiller, il vous faudra partir du XIXème siècle, la documentation administrative étant plus exploitable. Par exemple :

  • partir d'un acte notarié, lequel mentionne les origines de propriété, et procéder comme mentionné plus haut.
  • ou, si vous ne possédez pas l'acte notarié, démarrez votre recherche en repérant les parcelles liées au moulin sur le plan cadastral napoléonien. Le plan est complété par les états de section, lesquels indiquent les noms de propriétaires par section et par parcelle, au moment de l'élaboration du cadastre. Les biens d'un propriétaire et les mutations qui les affectent, sont à identifier ensuite dans les matrices cadastrales (voir l'aide à la recherche cadastre). Une fois que vous avez repéré une mutation, vous pouvez poursuivre la recherche : soit dans les fonds des bureaux de l'Enregistrement, soit dans les fonds des Conservations des hypothèques.
  • dans les fonds des bureaux de l'Enregistrement : ce fonds comprend notamment des tables d'acquéreurs, de vendeurs.  Les tables permettent d'identifier le nom du notaire ayant rédigé l'acte, et vous reprenez ensuite la recherche dans les fonds notariés (voir plus haut).
  • dans les fonds de Conservation des hypothèques, à partir d'un nom de personne. Voir l'aide à la recherche Hypothèques.

Votre quête s'achève.

La recherche a abouti : La ténacité finit souvent par payer. Vous avez non seulement la preuve que votre moulin est "fondé en titre" mais vous avez également constitué un socle documentaire retraçant l'histoire de ce moulin.
La recherche n'a pas abouti : Vous avez épuisé toutes les ressources disponibles identifiées aux Archives départementales. Pour autant, cela ne signifie pas que votre moulin n’est pas "fondé en titre". Mais malheureusement, malgré plus de 300 ans d’archives administratives et juridiques, aucun document consulté ne le mentionne.